Amblyopie : diagnostiquer et traiter l’œil paresseux

L’amblyopie, appelée “œil paresseux” ou “œil faible”, est une pathologie touchant l’enfant, affectant le développement normal de la vision sur un œil. La connexion et la transmission des images de l’œil au cerveau ne se développent pas correctement. Elle est le plus souvent liée à une anisométropie, c’est-à-dire une différence de correction entre les 2 yeux. Passé l’âge de 8 ans, l’amblyopie peine à être rééduquée, entraînant une baisse de vision définitive, d’où l’importance d’un diagnostic précoce et d’un traitement adapté. L’amblyopie se rééduque le plus souvent grâce au port de lunettes et à l’occlusion de l’œil fort par un cache.

Amblyopie - L'œil faible ou paresseux se rééduque à l'aide d'un cache œil et de lunettes
L’essentiel sur :

L’amblyopie

Définition : Œil faible de l’enfant, développement visuel anormal
Symptômes : Aucun, strabisme, perception de profondeur altérée
Causes : Déséquilibre musculaire, hypermétropie, différences de correction, cataracte juvénile
Diagnostic : Examen ophtalmologique, tests de vision avec cycloplégie
Prévention : Dépistage précoce
Traitement : Lunettes, cache, filtre
Complications : Perte de vision, absence de vision en 3D, limitations professionnelles

Définition – Œil faible ou paresseux

  • L’amblyopie, communément appelée “œil paresseux”, affecte principalement les enfants, entravant le développement normal de la vision dans un ou parfois les deux yeux.
  • Cette maladie se manifeste généralement dès la naissance et peut continuer à se développer jusqu’à l’âge de 7 ans.
  • Il s’agit de la première cause de diminution de la vision chez les jeunes enfants.
  • Le développement anormal est souvent dû à une discordance entre les deux yeux, où l’un a une vision significativement plus faible que l’autre.
  • En conséquence, le cerveau tend à ignorer les signaux visuels provenant de l’œil plus faible, ce qui entraîne une dégradation progressive de la vision dans cet œil : il devient faible.
  • L’amblyopie touche 3% des enfants. Il est donc crucial de la dépister et d’introduire un traitement approprié.

Le mot de l’expert sur l’amblyopie

Le diagnostic précoce et le suivi régulier pendant et après la rééducation de l’amblyopie sont la clés du succès. Tout se joue avant les 8 ans de l’enfant.

Dr Hugo Bourdon

Symptômes – Aucun, strabisme

L’amblyopie est le plus souvent asymptomatique, celà veut dire que l’enfant ne se plaint de rien et compense l’œil faible avec son autre œil. Les autres symptômes sont :

  • Le strabisme : Cela est souvent le signe d’un déséquilibre musculaire qui empêche les yeux de travailler de manière coordonnée.
  • Les maux de tête : dit asthénopie, l’enfant force sur le seul œil fonctionnel, fatiguant plus vite.
  • Mauvaise perception de la profondeur : La capacité à juger des distances et des profondeurs est altérée en l’absence d’équilibre visuel entre les 2 yeux.
  • Fermeture fréquente d’un œil : Certains enfants ferment fréquemment un œil pour mieux voir, surtout en présence de lumière vive.
  • Leucocorie : Un œil présentant un reflet blanc au niveau de la pupille est presque toujours amblyope. Il peut s’agir d’une cataracte, d’un décollement de rétine ou d’une tumeur. Le traitement de l’amblyopie commence par le traitement de la cause.

Causes & Facteurs de risque – Hypermétropie

Pour lutter efficacement contre l’amblyopie, il est essentiel de comprendre les causes sous-jacentes et les facteurs qui peuvent augmenter le risque de développer cette pathologie.

Causes

  • Différence significative de réfraction entre les yeux (amblyopie réfractive) : Cette cause est liée à une différence importante dans les prescriptions de chaque œil, due à des problèmes comme l’hypermétropie, la myopie ou l’astigmatisme.
  • Déséquilibre musculaire (strabisme) : un déséquilibre dans les muscles qui positionnent les yeux conduit à un strabisme, empêchant les yeux de travailler ensemble harmonieusement.
  • Obstruction de la vision (amblyopie par privation) : Des problèmes tels que la cataracte juvénile peuvent empêcher une vision claire dans un œil, nécessitant un traitement urgent pour prévenir une perte de vision permanente.

Facteurs de risque

  • Naissance prématurée : Les enfants nés prématurément sont plus susceptibles de développer cette pathologie.
  • Antécédents familiaux : La présence d’antécédents familiaux de l’amblyopie augmente le risque de développer cette pathologie.
  • Handicaps développementaux : Les enfants avec des handicaps développementaux ou un syndrome malformatif par exemple génétique peuvent être plus à risque.

La compréhension de ces causes et facteurs de risque est une étape cruciale dans la prévention et le traitement de l’amblyopie, permettant une intervention précoce et améliorant le pronostic futur.


Diagnostic – Examen sous cycloplégie

Le diagnostic précoce de l’amblyopie est essentiel pour garantir un traitement réussi et prévenir les complications futures. Voici les étapes clés du processus de diagnostic :

Dépistage

  • Le dépistage scolaire en maternelle par une infirmière est une étape clé du dépistage de l’amblyopie.
  • Par précaution une première consultation par un ophtalmologiste ou une orthoptiste entre l’âge de 3 et 5 ans permet d’éliminer une amblyopie ou la traiter.

Tests de vision sous cycloplégie (skiacol ou atropine)

  • L’enfant force naturellement sur ses yeux. On parle d’accommodation. Le test de vision n’est donc pas toujours chose aisée.
  • En cas de baisse de vision, notamment sur 1 seul œil, ou d’asymétrie de correction mesurée, un complément par gouttes relâchant l’accommodation est nécessaire.
  • Les collyres utilisés sont le Skiacol en cas de petit doute et l’Atropine en cas de gros doute.

Examen ophtalmologique

En cas d’amblyopie avérée, l’ophtalmologue doit s’assurer que celle-ci n’est due qu’à un problème de correction. Il réalise donc :

  • Un examen en lampe a fente afin d’éliminer une cataracte en analysant le cristallin
  • Un fond d’œil afin d’analyser la rétine et éliminer une anomalie.

Diagnostics différentiels

L’amblyopie est quasiment toujours causée par une anomalie de correction entre les 2 yeux. Exceptionellement, l’amblyopie est le symptome d’une cause plus grave :

  • Strabisme : Bien qu’étroitement lié à l’amblyopie, le strabisme est une pathologie distincte où les yeux ne sont pas alignés correctement, conduisant souvent au développement d’un œil faible pour éviter une double vision.
  • Cataracte pédiatrique : Cette condition implique une opacification du cristallin de l’œil, conduisant à une vision floue, et peut être confondue avec l’amblyopie, surtout chez les jeunes enfants.
  • Ptosis : Il s’agit d’une chute de la paupière supérieure, qui affecte la vision par privation, entraînant une amblyopie.

Conduite à tenir – Dépistage et suivi

Une fois le diagnostic d’amblyopie confirmé, il est crucial de définir une conduite à tenir adaptée pour gérer la pathologie efficacement. Voici les étapes clés à suivre :

  • Consultation régulière avec un spécialiste : Il est essentiel de maintenir un suivi régulier avec un ophtalmologiste pédiatrique ou une orthoptiste pour surveiller l’évolution de la vision et ajuster le traitement si nécessaire.
  • Éducation et sensibilisation : Éduquer les parents et les tuteurs sur l’importance d’un traitement précoce et les encourager à être vigilants quant à l’apparition de tout symptôme suspect.
  • Coopération active du patient : Encourager l’enfant à coopérer activement dans le traitement, en particulier lorsqu’il s’agit de thérapies impliquant le port de patchs oculaires ou de lunettes correctrices.
  • Soutien psychologique : Fournir un soutien psychologique si nécessaire pour aider l’enfant à gérer les défis associés à la pathologie, y compris les difficultés scolaires et les problèmes d’estime de soi.

En suivant ces directives, il est possible de gérer l’amblyopie de manière efficace et de prévenir les complications futures.


Prévention

La prévention de l’amblyopie repose principalement sur le dépistage précoce et une intervention rapide. Voici quelques mesures préventives essentielles :

  • Dépistage en maternelle : Les dépistages scolaires en maternelle puis primaire permettent d’identifier un œil plus faible que l’autre.
  • Attention aux antécédents familiaux : Les enfants ayant des antécédents familiaux de pathologies oculaires doivent être surveillés de près pour détecter tout signe d’amblyopie.
  • Suivi régulier : Il est conseillé d’effectuer des contrôles réguliers de la vue des enfants, en particulier avant leur entrée à l’école.
  • Éducation des parents : Informer les parents sur les signes et symptômes de l’amblyopie peut faciliter un diagnostic précoce.
  • Stimulation visuelle : Encourager les activités qui stimulent la vision, comme la lecture et les jeux qui nécessitent une bonne coordination œil main, peuvent être bénéfiques.

En adoptant ces mesures préventives, il est possible de réduire significativement le risque de développer une amblyopie et d’assurer une santé visuelle optimale dès le plus jeune âge.

Traitement – Lunettes et cache

Le traitement de l’amblyopie vise à améliorer la vision de l’œil affecté sans altérer celle de l’œil fort.

Lunettes correctrices à port permanent

  • En cas d’amblyopie réfractive, c’est-à-dire causée par une hypermétropie, un astigmatisme ou une myopie, le traitement commence par les lunettes.
  • Les corrections doivent être portées en permanence, il ne s’agit pas de lunettes de repos.
  • En cas de petite amblyopie, leur simple port permet parfois de rééduquer l’œil faible.

Occlusion de l’œil fort pour faire travailler le faible

  • La pénalisation de l’œil fort permet de faire travailler l’œil amblyope.
  • Un cache est posé sur l’œil afin de masquer la vision et faire travailler le plus faible.
  • Il est posé dès le matin sur l’œil et porté au départ en permanence.
  • Une fois que la vision est remontée, le cache est progressivement arrêté.

Alternatives au cache œil

Il est important de noter que le succès du traitement dépend largement de la coopération de l’enfant et de l’intervention précoce.

Si le cache n’est pas toléré, malgré plusieurs essais et insistance auprès de l’enfant, il est possible de pénaliser l’œil fort à l’aide :

  • D’un filtre posé sur les lunettes, obstruant la vision de l’œil fort.
  • De gouttes d’atropine brouillant la vision de l’œil fort.

Thérapies assistées par ordinateur

  • Des thérapies innovantes utilisant des technologies assistées par ordinateur, y compris la réalité virtuelle, sont actuellement explorées pour le traitement de l’amblyopie.
  • Certes séduisantes, ces thérapies ne font pour le moment pas parti de la pratique courante.

Évolution et pronostic

L’évolution de l’amblyopie varie considérablement en fonction de divers facteurs, y compris l’âge au moment du diagnostic et la gravité de l’atteinte visuelle. Voici quelques points à considérer :

  • Réponse au traitement : La plupart des enfants répondent bien au traitement, surtout s’il est initié tôt. Un suivi régulier est essentiel pour surveiller les progrès et ajuster le traitement si nécessaire.
  • Âge : Le traitement est généralement plus efficace chez les jeunes enfants. Au-delà de l’âge de 7-8 ans, il peut être plus difficile d’obtenir des améliorations significatives.
  • Coopération du patient : La réussite du traitement dépend en grande partie de la coopération de l’enfant, en particulier dans les thérapies qui nécessitent le port de patchs oculaires ou de lunettes correctrices.

Pronostic

  • Avec un diagnostic précoce et un traitement approprié, le pronostic pour les enfants atteints d’amblyopie est généralement bon.
  • Ils peuvent atteindre une vision normale et symétrique, permettant une vie quotidienne sans restrictions significatives.
  • Cependant, une surveillance jusqu’à l’âge de 10 ans est nécessaire pour maintenir les résultats obtenus.

Complications – Baisse de vision définitive

Bien que l’amblyopie soit le plus souvent rééduquée traitée avec succès, en particulier lorsqu’elle est diagnostiquée et traitée tôt, elle peut entraîner des complications si elle est négligée.

  • Perte de vision : La complication la plus grave est la perte de vision permanente dans l’œil affecté, qui peut être profonde dans les cas sévères.
  • Problèmes de perception de la profondeur : Une vision altérée entraîne des difficultés persistantes à percevoir la profondeur et à juger des distances correctement.
  • Difficultés d’apprentissage : Les enfants peuvent rencontrer des difficultés d’apprentissage en raison de problèmes de vision, affectant ainsi leur performance scolaire.
  • Restrictions professionnelles : Certains métiers sont soumis à visite ou certificat médical. Un œil faible peut contre-indiquer l’accès à cette profession (exemple : pilote de ligne, conducteur de train ou poids lourds, militaire…)
  • Contre-indication à la chirurgie réfractive : Un œil amblyope à mois de 6/10 est une contre-indication relative à la chirurgie réfractive.

Il est donc impératif de traiter l’amblyopie dès les premiers stades pour éviter ces complications et garantir une bonne qualité de vie pour l’enfant.

Questions fréquentes

À quel âge l’amblyopie est-elle généralement diagnostiquée ?

L’amblyopie est souvent diagnostiquée chez les jeunes enfants, généralement entre 3 et 5 ans. Un dépistage précoce est crucial pour un traitement réussi.

Le traitement de l’amblyopie est-il permanent ?

Oui après 10 ans, non avant. En effet, avant l’âge de 10 ans, un œil faible peut rechuter. Le suivi est donc essentiel.

Les adultes peuvent-ils être traités pour l’amblyopie ?

Non. Bien que le traitement soit efficace chez les enfants, les enfants de plus de 8 ans et les adultes ne disposent plus d’une plasticité cérébrale suffisante pour rééduquer l’œil amblyope.

L’amblyopie est-elle héréditaire ?

Oui. Les antécédents familiaux d’amblyopie augmentent le risque chez l’enfant, bien que la maladie ne soit pas strictement héréditaire.

Le port de lunettes peut-il corriger l’amblyopie ?

Oui. Le port de lunettes correctrices en permanence peut suffire à rééduquer une petite amblyopie réfractive. Si insuffisant, le cache doit être ajouté.

L’amblyopie peut-elle récidiver après le traitement ?

Oui ! Une amblyopie bien rééduquée peut rechuter au sevrage du cache. De fait, l’occlusion doit être arrêtée progressivement et le suivi doit être régulier jusqu’à l’âge de 10 ans.

Quelles sont les complications possibles si l’amblyopie n’est pas traitée ?

Non rééduquée avant l’âge de 8 ans, l’amblyopie est définitive. Il persistera donc un œil faible, un handicap visuel et une absence de vision 3D.

Sources